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Pourquoi avons nous tant de mal à dire non..docx (693276)

 

La chaise et le petit garçon de Maria Montessori.docx (13,1 kB)

 

Les parents d'aujourd'hui n'ont plus d'autorité.docx (320700)

 

Comprendre les enfants insupportables par Pascale Senk.docx (14,6 kB)

 

Les 3 R de la réparation La discipline positive de Jane NELSEN.docx (12479)

 

18 - La chaise et le petit garçon Par Maria Montessori (*) Chapitre II - Pédagogie : la rencontre

 

Maria Montessori est très certainement la plus remarquable pédagogue du 20° siècle. Ce texte, extrait d’un de ses livres, est très révélateur de l’esprit qui inspire la pédagogie qu’elle a diffusée dans le monde entier au travers des nombreuses écoles qu’elle a fondées.

« Un jour, les enfants s’étaient rassemblés en cercle, riant et parlant, autour d’une cuvette d’eau sur laquelle flottaient quelques jouets. Nous avions à l’époque à l’école un petit garçon d’environ deux ans et demi. Il était à l’extérieur du cercle, seul, et il était visible qu’il était rempli de curiosité.

Je l’observais de loin avec beaucoup d’intérêt. Il commença par s’approcher des autres enfants et essaya de se frayer un passage parmi eux, mais il n’était pas assez fort pour cela. Il resta donc là, regardant autour de lui. L’expression réfléchie de son petit visage était vraiment fascinante. J’aurais voulu avoir un appareil pour le photographier.
Tout à coup, son regard s’illumina à la vue d’une petite chaise. Très évidemment il avait décidé de la porter près des enfants de façon à pouvoir y grimper pour regarder par-dessus leurs épaules. Il commença à s’approcher de la chaise, le visage plein d’espoir, mais à ce moment-là, la maîtresse le prit brutalement (elle se serait défendue en disant « doucement ») dans ses bras, le soulevant au-dessus des têtes des autres enfants. Elle lui montra la cuvette d’eau en disant « Regarde, mon pauvre petit ! Comme ça tu peux voir toi aussi ! »

Il est certain que l’enfant, en voyant les petits jouets flottants, n’a pas éprouvé la joie qu’il était sur le point de ressentir en surmontant de ses propres forces un obstacle.
La vue de ces objets ne pouvait lui être d’aucun avantage, alors que le succès de son effort, si intelligent, aurait développé son potentiel intérieur.
La maîtresse a empêché l’enfant de s’éduquer lui-même, sans rien lui donner en compensation. Le petit garçon était sur le point de se sentir comme un conquérant, et il s’est retrouvé, impuissant, prisonnier de deux bras.

L’expression d’anxiété, d’espoir, de joie qui m’avait fascinée avait disparu de son visage pour être remplacée par l’expression de stupidité caractéristique de l’enfant qui sait que les autres vont agir à sa place. »

(*) Extrait de : « La pédagogie scientifique appliquée à l’éducation des enfants »

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Pourquoi avons nous tant de mal à dire non.

 

Il était une fois une petite fille qui vivait chez ses parents et partageait son temps entre l’école et ses amis.

ImageCette petite fille avait toujours été plutôt sage. Comprenez, on valorisait sans cesse son comportement qui montrait qu’elle était gentille. Elle était calme, elle ne bougeait pas trop. Elle savait rester en retrait avec les adultes. Elle savait qu’elle était aimée quand elle se comportait bien. Comme elle avait très peur de se retrouver seule, elle s’appliquait à se faire aimer. Et dès qu’elle faisait quelquechose qui ne plaisait pas à autrui, on lui faisait bien sentir qu’elle était méchante. Qu’elle n’était pas aimable. Que personne ne l’aimerait ainsi. Que c’était mal. Ca la troublait beaucoup, car elle avait peur. Cette petite fille avait entendu ces mots depuis toujours. Et surtout, elle les entendait à la maison mais aussi à l’école. A l’école, il fallait rester assis de longues heures, se retenir pour faire pipi, se retenir pour parler, ne pas rigoler, et toujours faire ce que le maitre disait. C’était un peu difficile au début. Puis avec le temps cette petite fille oublia ces besoins, les rangea dans une petite case de son corps enfermés à double tour. Cette petite fille n’avait jamais rien connu d’autre que cela, et trouvait ça parfaitement normal.

Quand de temps en temps elle refusait de faire quelquechose, quand elle disait non, on lui faisait sentir qu’elle était une mauvaise fille et qu’elle était indigne de son entourage. Cette petite fille était sans cesse en train de s’ajuster à ce que souhaitait son entourage. C’était d’ailleurs assez fatigant, parce que par exemple son papa et sa maman n’avaient pas exactement les mêmes exigences. Alors, si je fais bien pour papa, pourquoi est-ce que ça n’est pas bien pour maman? D’ailleurs, parfois elle aurait bien eu envie de se mettre en colère, quand c’en était trop. Mais on lui avait montré son visage, dit qu’elle était bien laide ainsi transformée. Elle avait eu peur : qu’est-ce donc que ce monstre qui transforme mon visage et me pousse à crier? Ca ne peut pas être moi. Elle l’avait donc tapi aussi tout au fond de sa tête, avec mout craintes qu’il ressorte, certes, mais comment faire autrement?

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Cette petite fille grandit ainsi, entre ses parents qui l’aimaient et l’école qui lui apprenait des tas de choses. Un jour, elle eut fini l’école, trouva un métier qui lui semblait adapté à ses aspiration et un gentil mari. C’était un peu moins simple une fois adulte parce que les autres ne réagissaient pas toujours comme la maitresse ou maman. Parfois ils avaient des réactions incontrôlables. Surtout, elle se sentait souvent perdue, ne sachant pas quoi faire, n’ayant plus personne pour lui dire ce qu’elle avait à faire. Elle essayait d’être parfaite, mais ça n’était pas assez : il fallait aussi qu’elle sache être actrice de sa vie. Mais il y avait un problème : ça on ne lui avait jamais appris. Et surtout comme elle échouait, elle se sentait très coupable de ne même pas arriver à être ce qui lui semblait un état d’adulte. C’était décourageant car toutes ses tentatives pour être parfaite  et gentille l’amenaient encore plus vers le désespoir.
ImageUn jour la petite fille qui était devenue une femme sentit un petit coup de pied dans son ventre. Un petit bébé se manifestait. La petite fille était ravie. Elle allait pouvoir donner tout son amour à l’enfant qui allait naitre. L’enfant naquit, et ce fut beaucoup de bonheur. Mais l’histoire ne s’arrête pas là. Le petit bébé grandit. Le petit bébé touchait à tout. Le petit bébé faisait beaucoup de choses qui dérangeaient sa maman.

Mais sa maman avait un problème : on lui avait toujours appris que dire non, c’était prendre le risque de perdre l’amour de la personne qui reçoit le "non". Elle était face à un gros dilemme : perdre l’amour de son petit garçon? Impossible. Laisser passer ce qui la dérangeait? Beaucoup plus habituel pour cette petite fille. Cette petite fille laissait donc son enfant faire des choses même si ça n’était pas agréable du tout pour elle et qu’elle devait réparer ensuite. Cette petite fille n’avait jamais appris à dire non, comment aurait elle pu le faire spontanément? Elle aurait pu sentir que son besoin de sécurité n’était pas satisfait lorsque son fils partait en courant sur la route. Elle aurait pu sentir que son besoin de respect pour son travail était en danger lorsque son fils démontait toute sa pile de linge. Mais rappelons nous : à l’école, cette petite fille avait cadenassé ses besoins à double tour pour ne plus qu’ils viennent l’enquiquiner. La clé avait été perdue. Plus d’accès à ses repères intérieurs pour savoir comment protéger ses besoins.
La petite fille essaya donc de faire ce qu’elle avait toujours fait : demander à une figure parentale ce qu’elle devrait faire dans cette situation. Ses parents étaient loin, mais il était facile dans les magazines et à la télé de trouver toute sorte de figure parentale qui vous disaient quoi faire. Elle se pliait aussi aux exigences du médecin qui savait de toute façon mieux qu’elle ce qu’il convenait de faire. C’était rassurant par un certain coté. D’un autre, elle avait de grandes difficultés. Son fils faisait de la résistance. Elle ne se sentait pas vraiment bien avec tout cela. Parfois, elle explosait sans raison. Elle se mettait dans des colères noires, et elle sentait en elle une violence incroyable. Elle en voulait énormément à son fils de la mettre dans des états pareils. A trop laisser ses besoins de coté, un jours ils finissaient pas déborder de la cage où ils étaient enfermés et à sortir avec violence.
ImageEt la suite de l’histoire?

Il y a deux options, à vous de choisir:

1. elle rencontra une amie qui lui dit : Tu es trop laxiste. Il faut te resaisir. Ton fils n’est pas en sécurité sans limites.
La petite fille opina.
Son amie  lui prescrit une liste de choses à interdire. La petite fille s’y essaya. Mais elle se sentait très coupable de ne pas être une mère acceptable. Elle arrivait peu ou prou à suivre les consignes, mais de plus en plus, elle fuyait la relation avec son fils. Ca n’était pas très confortable, cet enfant qui dit non, qui refuse, qui fait des crises. Elle se sentait souvent fatiguée. Elle vit de moins en moins cette amie, sans pour autant comprendre ce qu’il se passait.
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2. elle rencontra une amie qui l’écouta en silence. Son amie ne lui dit rien sur sa façon de faire. Elle sentait bien que son amie faisait différemment, mais elle ne percevait pas exactement pourquoi. Plusieurs fois, elle explosa sur son fils en présence de son amie et lui mit une fessée. Son amie accueillit juste sa colère. Petit à petit, elles en vinrent à échanger sur des choses plus intimes. Sur leurs peurs, leurs émotions. Les années passèrent. Cette amitié grandissait, elle faisait du bien à la petite fille. Elle se sentait aimée quoi qu’il arrive par cette amie. Petit à petit, elle apprit à accepter ses émotions, ses colères. Elle apprit aussi en voyant son amie faire avec sa petite, à identifier ses besoins, à demander, à voir ce qui était acceptable et ce qui ne l’était pas. Son estime d’elle même grandissait de jour en jour à mesure qu’elle se reconnectait à ses ressentis. A tel point qu’un jour la peur de ne plus être aimée par son enfant si elle lui disait "non" disparut d’elle même, sans qu’elle sache bien comment. Cette amie possédait la clé secrète qui ouvre toutes les cages intérieures….

ImageEt qui permit à la petite fille de retrouver le contact avec ses limites et ses besoins. Ce qui lui permit d’entrer en relation avec son fils de façon plus sereine et respectueuse pour lui comme pour elle. Les explosions de colère s’apaisèrent, et furent remplacées par un simple sentiment de colère qui n’engendrait pas de violente réaction, mais juste une affirmation de ses besoins. Elle apprit au passage que désaccord n’équivaut pas à désamour et que son fils l’aimait tout autant, même s’il n’était pas toujours d’accord.

Cette petite fille est toujours en chemin vers elle même….

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Les parents d'aujourd'hui n'ont plus d'autorité

 

On entend souvent cette phrase dans la bouche de nombreuses personnes… J’avoue qu’elle me fait bondir. Comme si c’était aussi simple… comme si il y avait les parents d’avant, les bon (qui en général sont en train de parler), et ceux d’aujourd’hui, les mauvais.

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Qui d’accuser les parents de laxisme lorsqu’il s’agit d’expliquer la violence des jeunes (en dépit du fait qu’on sait aujourd’hui qu’elle est liée à la violence éducative). Qui d’accabler les parents qui laisseraient tout "passer" lorsqu’un bambin se roule par terre dans un magasin. Quel parent n’a pas entendu "il y a des fessées qui se perdent" dans la rue, le square, alors que son enfant avait un comportement qui dérangeait certains. Je me suis longtemps sentie mal à l’aise face à cette injonction d’autorité. Nous n’avions pas seulement été des enfants "gâtés" comparé à nos parents, voici qu’enfin devenus adultes et parents, on nous accusait d’être responsables des maux de la société. Ne serions nous donc jamais des personnes respectables? Mais au fait, c’est quoi l’autorité?

L’autorité et l’obéissance comme seule voie d’éducation?

Lors des siècles passés, le respect de l’autorité et l’obéissance ont toujours été un objectif majeur. Le fonctionnement de la société était autoritaire, ce qui sa traduisait jusque dans la plupart des familles, des établissements d’enseignement et des lieux de travail. Ceux qui avaient le mieux appris à obéir s’en sortaient mieux socialement. Cette obéissance a toutefois eu des conséquences dramatiques lors de la seconde guerre mondiale (Miller, 1985). Habitués à obéir et élevés sous obéissance totale, les criminels de guerre ont amené à l’abattoir des milliers de personne. Les "justes" quant à eux, qui ont sauvé des vies, avaient reçu une éducation empreinte de bienveillance (voir les ouvrages d’Olivier Maurel). L’expérience de Milgram a par ailleurs montré qu’une bonne part des personnes, lorsqu’elles sont soumises à une autorité scientifiques, obéissent à l’injonction de faire mal à quelqu’un.

La psychanalyse, ayant évolué dès ses débuts dans ce type de société très autoritaire, a intégré cette croyance comme un fait acquis dès ses débuts : l’enfant était égoïste et sans limites, il fallait lui enlever ces penchants négatifs. L’autorité parentale sans limites était vue comme une façon de rendre les enfants acceptables pour vivre en société. Déresponsabilisé depuis son plus jeune âge, l’enfant était vu comme un être dominé par ses pulsions que l’adulte devait réprimer. Cette vision se comprend puisque n’ayant jamais la faculté d’exercer sa responsabilité et sa capacité à coopérer, il ne pouvait, pour défendre cette atteinte à son intégrité, que manifester son mécontentement par des comportements portant atteinte à l’autorité.

Dans les années 60, la société a été traversée par un vent démocratique et anti-autoritaire. Les femmes, qui étaient elles aussi soumises à l’autorité, se sont rebellées. L’image des enfants a également changé, et certains ont défendu une éducation démocratique et avec peu de contraintes. Cela a abouti dans les années 80 à la croyance qu’il fallait expliquer, parler à l’enfant, et que celui-ci comprendrait de lui-même et obéirait par la raison à ses parents. Croyance qui a donné lieu au vent de retour de l’autoritarisme actuel. Aujourd’hui on sait grâce aux études sur le cerveau que cette forme de libertarisme ne correspond ni aux besoins ni au développement de l’enfant.

Parallèlement, même si les châtiments corporels ont évolué, ils sont toujours bien présents (85% des enfants d’aujourd’hui en ont reçu). Les parents d’aujourd’hui cherchent souvent à faire autrement, ayant souffert ce ceux-ci dans leur enfance. Mais n’ayant aucun autre modèle, c’est compliqué, et souvent, ils y reviennent lorsqu’ils sont à bout. Ce n’est pas un manque d’autorité, c’est souvent une difficulté à poser ses limites sans utiliser les châtiments corporel ou des méthodes qui ne leur conviennent pas.  Faute de modèle.

L’attachement comme base du développement de l’empathie pour autrui

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De nos jours, les données scientifique, qu’elles soient issues de l’étude du comportement animal, humain ou encore de la neurobiologie, tendent à montrer que cette vision de l’enfant qui doit être réprimé dans son égoïsme est complètement erronée. L’enfant humain est programmé pour développer de grande facultés d’empathie dès la naissance, parce qu’il est extrêmement dépendant des adultes pour sa survie pendant longtemps. Des soins adaptés à ses besoins et à son développement affectif et un attachement sécure à sa personne de référence (mère, père, ou autre adulte) lui permet progressivement de développer une confiance en lui (Bowlby). C’est cette estime de lui même qui lui permet de devenir réellement autonome et de développer un intérêt pour les autre. La parentalité positive s’attache entre autre à développer le potentiel des enfants pour l’empathie et la coopération, au lieu de réprimer une animalité qui n’est que le fruit de l’éducation répressive qu’on reçu la majorité des enfants.

Quand j’étais petite, j’entendais sans cesse "fais ceci, fais cela". "Tu vas voir, si tu ne fais pas ce que je te dis, ce qui va t’arriver!". "mange ta soupe sinon tu n’auras pas de dessert!"."Je compte jusqu’à trois, tu obéis sinon tu auras une fessée", mais encore "tu te tais sinon tu auras 3h de colle"… Maintenant imaginons que nous soyions adultes et que nous entendions sans cesse ces phrases au travail. Quelle image de nous même pourrions nous développer? Quelle colère développerions nous à l’égard de celui qui est notre responsable ! Son message implicite en l’essence est : "je ne fais aucune confiance en ta capacité à m’aider, c’est pourquoi je suis obligé de te forcer à le faire en te menaçant". Bien, cher patron, si tu n’as aucune confiance en moi, eh bien je vais te prouver que tu as raison et je ne vais surtout pas t’aider ! Et surtout je n’agirai comme tu le veux que par peur de la sanction, jamais parce que j’ai envie de t’aider ! Enfant, j’ai surtout développé des tas de croyances sur moi, comme quoi je n’étais pas fiable, que j’étais indigne de confiance, que je ne savais pas prendre de responsabilités. Choses qui m’ont poursuivies bien longtemps et qui ne m’ont pas du tout aidée à avoir un comportement responsable, puisque quelqu’un s’était toujours chargé pour moi de prendre la responsabilité. Je n’avais qu’à obéir !

Les limites de qui?

Posons nous la question : nous souhaitons faire coopérer nos enfants, mais pour quelle raison souhaitons nous qu’ils le fassent? Par peur de la sanction? Ou bien parce qu’ils en voient le sens profond? Et si, au lieu de chercher à fixer les limites de nos enfants, nous réfléchissions sur les nôtres? Quand je cherche à faire coopérer mon enfant, je cherche avant tout à satisfaire un besoin qui m’appartient. Mes limites, c’est le contour des situations dans lesquelles mes besoins sont respectés. J’ai besoin d’indiquer aux autres quels comportements me permettent de me respecter et quels comportement sont insupportables pour moi. Elles me sont personnelles. Poser "des limites" à ses enfants n’a aucun sens car les limites ne sont pas celle de l’enfant mais celles de la personne qu’il a en face de lui. En me fixant plus sur ce dont j’ai besoin, et non sur des solutions toutes faites, on arrive souvent à des solutions créatives que nos enfants peuvent nous aider à trouver, participant au respect des besoins de tous.

On sait aujourd’hui que l’enfant apprend beaucoup par imitation et par expérimentation. Aussi, c’est dans la relation parent-enfant qu’il puisera un exemple pour toutes ses relations futures. Dans une société qui base de moins en moins son fonctionnement sur l’obéissance et la règle et de plus en plus sur la responsabilité personnelle et le souci d’autrui, les enfants ont besoin de développer leur intelligence émotionnelle leur permettant à la fois de respecter leurs propres besoins, tout en étant à l’écoute de ceux des autres. C’est cette confiance en leur capacité progressive à être responsable et coopérant qui leur permettra d’acquérir la confiance en soi nécessaire à la vie en société.

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Comment faire en pratique?

Souvent, les croyances sur les enfant débute dès leur plus jeune âge. En effet, la société porte à croire que les bambins et bébés devraient être capable d’agir comme des adultes. Qu’ils devraient être capables de rester sages, sans bouger pendant des heures, qu’ils devraient contenir leurs émotions. Nous savons aujourd’hui qu’ils n’en ont pas la capacité, parce que leur cerveau n’est pas encore mature pour cela et parce qu’ils ont besoin pour grandir de bouger, d’expérimenter, d’exprimer leurs émotions. L’image que nous en avons vient souvent d’enfants qui se tiennent à carreau, soumis par la peur. Le problème est que le regard que que porte un parent sur son enfant influence grandement le comportement de celui-ci. Si un parent a des attentes démesurées, l’enfant ne peut y répondre. Le parent porte alors souvent un regard négatif sur l’enfant (il est turbulent, il est capricieux…), étiquette que l’enfant intègrera alors comme sa personnalité et à laquelle il obéira.

Avant 4 ans, un enfant est peu capable d’imaginer ce que la personne en face de lui ressent. Cet âge correspond avant tout au développement du "je", de la compréhension qu’il est une personne unique. Il a besoin d’apprendre progressivement à connaitre ses émotions, à les nommer et à les utiliser pour protéger son intégrité.
C’est sur cette base que ses neurones-miroirs feront le reste par la suite : ce qu’il connait de lui, il peut le reconnaitre chez d’autres et éprouver de l’empathie. Il peut donc aider les autres à satisfaire leurs besoins et coopérer afin que tout le monde se sente bien. Il a besoin, surtout petit, que ses parents lui expliquent leurs besoins afin de donner du sens à leurs demandes. Il a besoin aussi de grandir sans jugement sur sa personnalité, afin de protéger son estime de lui même, qui est si importante pour pouvoir éprouver de l’empathie pour autrui.

Je peux aussi toujours me rappeler que lorsque mon enfant ne coopère pas, il ne le fait jamais contre moi mais pour lui. Il dit oui à un besoin important pour lui, que je n’ai pas identifié. Regarder le problème ensemble et voir comment on peut le résoudre ensemble en tenant compte des besoins de tout le monde ouvre des perspectives souvent insoupçonnées.

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Alors, manque d’autorité des parents d’aujourd’hui? Ou plutôt une volonté très louable de respecter leur enfant et un besoin d’outils pour y parvenir tout en se respectant soi ?

La bonne nouvelle c’est que de nos jours ces outils existent et sont disponible, et de nombreux parents les ont déjà expérimentés. On peut les trouver sous forme de livre, de magazines, de forums ou sous forme d’ateliers de parents. Ici par exemple : https://sites.google.com/site/petitsmotspourgrandir

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Comprendre les enfants insupportables par Pascale Senk

 

Certains sont mis sous Ritaline, d'autres suivent une psychothérapie avec leurs parents 

 

 

Il y en a probablement dans votre entourage. Ou vous les voyez parfois, dans des restaurants ou des lieux publics, courir au milieu des tables, faire l'hélicoptère en poussant des cris ou interrompre sans cesse les conversations de leurs parents visiblement épuisés mais fascinés par tant d'énergie. Eux, ce sont des enfants «agités», «turbulents» ou «difficiles». Depuis quelques années, et suivant le tableau clinique DSM IV de la psychiatrie américaine, certains d'entre eux sont qualifiés d'hyperactifs ou même «d'hyperkinétiques». Ces enfants THADA (c'est-à-dire atteints de Trouble de l'Hyperactivité Avec Déficit de l'Attention) seraient actuellement entre 3% et 11% de la population enfantine.

Mais où finit l'extrême besoin de dépense physique, le côté «éveillé et épanoui» qu'adorent les parents d'aujourd'hui et où commence le trouble chez ces petits garçons (l'hyperactivité est très rare chez les petites filles)? C'est toute la question qui se pose aux psychiatres et psychanalystes qui reçoivent ces trublions. «Comment évaluer ces comportements quand on observe que jamais l'enfant lui-même ne s'en plaint, ou ne fait de demande de traitement, mais seulement l'école -et cela est variable selon les enseignants- ou les parents?», s'interroge Marika Bergès-Bounes. Psychologue-psychanalyste à l'hôpital Saint-Anne de Paris, elle vient de diriger un impressionnant ouvrage collectif sur le thème de L'enfant insupportable (Ed ERES).

 

«Ne m'oubliez pas!»

 

 

«Ce sont des patients qui arrivent déjà diagnostiqués chez nous! Et insensiblement, avec les années, concernant ce dont ils sont atteints, nous sommes passés d'une simple agitation motrice à “une maladie”, et aujourd'hui à un “trouble du comportement”! Pour nous, il y a nécessité surtout de comprendre ce qui est d'abord un symptôme», martèle-t-elle. Un avis partagé par Mazy Varraud, orthophoniste dans un centre médico-psycho-pédagogique à Évreux. «II n'y a pas d'enfants insupportables, il n'y a que des enfants insupportés. Et surtout, poursuit-elle, des enfants en réaction. La preuve, ils sont le plus souvent calmes avec nous. Mais il suffit qu'un de leurs parents leur dise “dis au revoir à la dame” pour qu'ils se mettent à s'agiter, courir partout ou même se jeter sous les tables.»

Lui vient alors à l'esprit l'histoire de Kyran, 10 ans. À la moindre remarque d'un enseignant, il se mettait à ruer dans les brancards. «Notre équipe pluridisciplinaire s'est penchée sur son histoire et a vu que Kyran avait été placé en foyer parce que ses parents l'avaient maltraité psychologiquement. Mais il souhaitait toujours les revoir, tout en étant en colère contre eux. C'est cette colère de fond qui refaisait surface à la moindre occasion.»

L'hypertonicité motrice est donc à regarder comme un signal. «Elle veut toujours dire quelque chose dans l'économie d'une famille ou d'une classe», observe Marika Bergès-Bounes. Un problème de place, notamment. Un petit frère est né il y a peu, ou la tension monte entre les parents… D'ailleurs ces agités ont cette manie de sans cesse faire parler d'eux, de ramener l'attention des parents à leur existence, comme une façon de dire «Ne m'oubliez pas! Je suis là». Ces enfants n'ont pas encore trouvé une place d'où ils peuvent parler. Alors, à défaut de pouvoir mettre en mots, ils remuent. «Chez certains, il y a aussi la volonté inconsciente de prouver qu'ils sont vivants, poursuit la psychanalyste: une mère dépressive, ou un frère mort avant eux… Ils n'ont de cesse de lutter contre cette angoisse de mort en occupant le terrain.»

Certains parents, désireux que ces symptômes cessent vite, vont dans les services qui prescrivent de la Ritaline, le fameux psychotrope qui «rend les enfants sages». Les psychanalystes y sont pour la plupart opposés et travaillent donc dans un tout autre esprit que leurs collègues psychiatres. «Si l'agitation motrice était une pathologie, cela se saurait, affirme Marika Bourgès-Bounes. Le grand neuro-psychiatre Henri Wallon lui-même ne la considérait pas comme une maladie dans la mesure où elle s'arrête avec l'adolescence.»

Aujourd'hui, cette psychanalyste et son équipe de Saint-Anne déplorent que des enfants en échec scolaire ou déprimés soient rapidement catalogués «enfants THADA». «Le terme est devenu un vaste fourre-tout à l'intérieur duquel on ignore si l'agitation motrice vient avant la perte de concentration ou après.» Elle observe aussi que de nombreux parents arrivent en consultation avec le souci paradoxal que leur enfant soit bien «hyperactif» ou «surdoué». «Dans les deux cas, ces enfants sont dans le “Plus”», note la psychanalyste. Une démesure qui selon elle serait un produit inattendu de notre société d'hyperconsommation toute occupée à «gaver les enfants» sur tous les plans

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Les 3 "R" de la réparation - La discipline positive de Jane NELSEN

 

Reconnaitre: sa part de responsabilité: Oups! j'ai fais une erreur

Réconcilier:                                       Je suis désolé(e) d'avoir...

Résoudre:                                         J'aimerais que l'on trouve une solution ensemble

 

Les 4 "R" de la punition  

Rancoeur:  C'est pas juste. Je ne peux pas faire confiance aux adultes

Revanche:  Bon, là, c'est eux qui gagnent, mais je les aurai la prochaine fois

Rebellion:  Je vais exactement l'inverse pour leur prouver qu'ils ne peuvent pas m'obliger à faire ce qu'ils veulent

Retrait:      La prochaine fois, je ne me ferai pas prendre. Baisse de l'estime personnelle: Je ne vaux rien

D'ou nous vient cette folle idée que pour qu'un enfant se conduise mieux, il faut d'abord qu'il se sente dévalorisé ?

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Transformer les si en quand !

 

Cas pratique : votre enfant a sorti plusieurs jeux dans le salon et vous demande s'il peut regarder la télé.
 
Ce à quoi vous pourriez répondre :

"Si tu ranges tes jouets, tu pourras regarder la télé mais il faut d'abord ranger !"

"Oui bien sûr, quand les jouets seront rangés, tu pourras regarder la télé !"

Percevez-vous la différence dans le message délivré ?
 
La phrase en "si" induit une condition, il faut d'abord ranger et éventuellement ensuite, l'enfant pourra regarder la télé. Le cadre n'est pas fixe car conditionné par le rangement. Cette phrase crée une incertitude chez l'enfant : "Est-ce que je vais pouvoir regarder la télé ou pas ?"
La phrase en "quand" (ou tout autre marqueur de temps : dès que, après que...) propose un cadre fixe dans lequel l'enfant peut se retrouver facilement. Il n'y a pas de condition, juste un enchaînement d'actions. D'abord on range puis on regarde la télé. Le cadre est clair, il n'y a pas d'incertitude. Et puis commencer sa phrase par "Oui bien sûr" invite naturellement à la coopération :
Je vous invite donc à cette gymnastique et à expérimenter cela chez vous :
 
"Oui, bien sûr, on pourra lire un livre dès que tu te seras lavé les dents !"
 
"Oui, bien sûr, tu pourras jouer à la DS quand tes devoirs seront finis !"
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Rivalités, jalousie et justice entre frères et soeurs de Jesper Juul

 

Je ne sais pas vraiment si la jalousie entre frères et sœurs existe telle que nous le pensons habituellement, mais je sais que le terme est souvent utilisé par les adultes de manière qui porte préjudice à tous.

Lorsque la sœur aînée demande : « Pourquoi c’est toujours le plus petit qui a toujours tout en premier ? » et, ce qui n’est pas anodin, le dit souvent tout en poussant ou pinçant discrètement son petit frère, est-ce parce qu'elle est jalouse ?

Non, ce n'est pas de la jalousie. De cette manière, elle essaie de dire à ses parents :
« Il y a quelque chose dont j'ai besoin de votre part. Je ne suis pas frustrée parce que mon petit frère, que j'aime beaucoup, en reçoit trop ou en premier. Je suis frustrée parce qu’il y a quelque chose qui me manque, ce n’est pas par rapport à ce que lui obtient. Mais je ne sais pas l'exprimer autrement, et j'espère bien que vous êtes suffisamment adulte pour voir au delà de ma frustration et considérer mes besoins. »

La jalousie, comme lorsque celui/celle que vous aimez tombe amoureux de quelqu'un d'autre, est un cocktail de tristesse, colère et anxiété ; sentiments qui sont tous pertinents au regard de cette situation et doivent être exprimés et considérés. Le problème lorsqu’on catégorise les conflits entre enfants comme étant de la jalousie – « tu es tout simplement jaloux(se) » - c'est que le conflit ne sera jamais appréhendé de façon appropriée et ne sera non plus réglé. Sa vraie nature reste cachée. C’est souvent un moyen d'ignorer l'enfant, d'une manière qui dit en fait : « Tu as des sentiments stupides et mauvais pour lesquels il n’est pas la peine de perdre du temps. »

Important ou embêtant

Ce traitement superficiel du dilemme des enfants est encore pire quand on parle de la soi-disant jalousie des enfants par rapport à leurs parents ou à un nouveau-né. Quand par exemple une mère (ou un père) seule au foyer est tombée amoureuse et a invité son nouveau petit-ami à la maison, il s’ensuit souvent le drame silencieux suivant : l’adulte prépare soigneusement la mise au lit, fait attentivement la lecture d'une histoire un peu plus longue qu’à l’habitude vers 20h, et quand l’enfant dort vers 20h30, elle pousse un soupir de soulagement et se prépare à accueillir son nouvel ami. Une demi-heure environ après son arrivée, l'enfant se réveille et va au salon. Les adultes sont l’un comme l’autre désemparés, ils veulent être seuls, et la mère va donc essayer de remettre l'enfant au lit avec un « Maintenant, tu dois dormir. Il est tard ! »
Mais l’enfant ne veut pas dormir et la frustration des adultes ne cesse d’augmenter.
« Il est jaloux ! », disent-ils.

Non, il n'est pas jaloux. Il est agité. Il est troublé parce que sa mère toute la journée a été tendue et pleine d’attentes – et c’est contagieux. Il est troublé parce que sa mère est évidemment sur le point de se lier à un autre, alors il se demande : « Est-ce que notre famille va maintenant changer de nouveau, est-ce que ma mère tient toujours à moi aussi, ma mère est nerveuse et effrayée – je me demande bien pourquoi ? »

N'importe qui peut vérifier cela par soi-même. Lorsque l'enfant se réveille et s'invite dans le salon, on peut l’accueillir par exemple avec un : « Ah, quelle bonne surprise, tu t’es réveillé ! Viens dire bonjour à mon ami Eric, qui, va probablement venir nous rendre visite régulièrement. »

Prenez votre enfant sur les genoux et continuer de parler avec votre petit-ami. Dans un court laps de temps, l'enfant demandera à être mis au lit à nouveau – peut-être avec un verre de lait ou quelque chose à manger.

Cette façon d'aborder la situation transmet à l'enfant un message important : « Tu restes une part importante de ma vie et je t'aime encore. Tu tiens également une place significative dans ma vie, aussi je voudrais te faire partager ma joie et la présence de mon petit-ami. »

Ce qui est tout le contraire du message contenu dans la description précédente, qui est : « Tu me déranges et m’ennuies, allez, file au lit ! »

Ce message renforce naturellement l'anxiété de l'enfant, c’est le début d’un cercle vicieux qui peut très facilement conduire à des sentiments négatifs envers le nouvel adulte, et peut aller jusqu’à ce que l'enfant lui-même culpabilise d'être celui qui a détruit la relation.

Être envieux

L'envie est un sentiment très différent de la jalousie, et les enfants ont souvent de bonnes raisons d’être envieux les uns des autres (comme les adultes d'ailleurs).

Je voudrais avoir ton ours en peluche.
Je voudrais pouvoir aller tout seul au terrain de jeu, comme toi.
Je voudrais être assez petit pour qu’on me pousse dans la poussette comme toi.
Ton vélo est beaucoup mieux que le mien. Si seulement je pouvais l’avoir.

Être envieux est souvent faussement considéré comme étant de la jalousie, mais c’est une réaction tout aussi saine et naturelle que commune. Le problème, entre autres choses, c’est que les enfants n'ont pas les mots justes pour exprimer ce qu'ils veulent réellement. Ils disent : « Ton ours est bête, il est pas beau ! » ou « Donne-le-moi, il est à moi ! » jusqu'à ce qu'ils apprennent à dire : « C'est un très joli ours en peluche que tu as. Est-ce que je peux te l’emprunter ? »

Qu'en est-il de la justice ?

La notion de justice tient une place importante dans de nombreuses familles. Beaucoup de parents sont fiers d'être justes envers leurs enfants, ce qui signifie surtout qu'ils ne font pas de distinction entre eux. Cette conception particulière de la justice contribue malheureusement fortement à cette prétendue jalousie entre frères et sœurs.

Tous les gens sont différents et ont des besoins différents à des moments différents. C’est particulièrement vrai pour des enfants d’âges et à des stades de développement variés. Si vous souhaitez donc traiter vos enfants de façon équitable, il faut les traiter différemment. Rappelez-vous que l'alternative à la justice n’est pas l'injustice - c'est juste le contraire. Les enfants peuvent facilement gérer le fait qu’il y ait des différences. C’est seulement quand ils ont vécu quelques années dans une famille où la soit-disant justice domine qu’ils commencent à coopérer (imiter) et exige à leur tour de la justice, mais une justice au millimètre. Une autre raison peut être qu'ils ont effectivement été très injustement traités à une ou plusieurs reprises. Si vous êtes donc tombés dans le cercle vicieux qu’est celui de la justice, il va sans doute vous falloir faire un travail difficile pour en sortir, mais cela sera payant.

Les raisons qui nous poussent à être justes en tant que parents varient énormément. Certains d'entre nous avons enduré durant l’enfance de grandes injustices et nous en sommes ensuite venus à la conclusion que la justice devait être la réponse. D'autres sont très préoccupés par la justice dans un sens plus politique mais ignorent que la politique et la psychologie sont souvent incompatibles. Et d'autres encore prétextent de bonnes raisons.

Toutes ces raisons proviennent généralement d’un sentiment fort qu'il est important de protéger les faibles. C’est un argument tout à fait valable mais qui, cependant et très souvent, signifie simplement que les faibles doivent avoir plus que les forts ou que les petits doivent avoir plus que les grands. Quoiqu’il en soit, cela veut dire qu’une différence doit être faite si on tient à être vraiment juste - et pas seulement en apparence. Concrètement, la sœur aînée de quatre ans sera par exemple triste de constater qu’aucun cadeau ne lui est offert à l’occasion des 2 ans du petit frère, mais c’est important pour son développement en tant qu'être humain qu'elle puisse être autorisée à être bouleversée à ce sujet jusqu'à ce qu’elle puisse (assez rapidement) passer outre. À long terme, elle ne gagne rien à apprendre que vous avez acheté des choses ou satisfait à ses demandes à chaque fois qu'elle était frustrée ou contrariée.

Cela va aussi pour des choses concrètes, comme par exemple les bonbons. Il est plus approprié que les enfants, durant les six ou sept premières années de leur vie, apprennent à se demander s’ils veulent des bonbons ou s’ils préféreraient utiliser l'argent pour autre chose, plutôt que de leur apprendre à demander et s’en mettre plein la tête, juste parce que d'autres le font. Le plus juste est d'être aussi conscient que possible des différents besoins de ses enfants et du mieux que l’on peut leur donner ce dont ils manquent ou ont réellement besoin. Il ne s'agit pas de satisfaire à n'importe quel prix leurs désirs plus ou moins passagers.

Devenir l’aîné

La jalousie entre frères et sœurs existe et peut être réellement fondée. C’est particulièrement vrai si le père ou la mère ou les deux tiennent effectivement plus à un enfant qu'à un autre. C’est ce qui arrive parfois dans les familles classiques, mais c’est évidemment beaucoup plus fréquent dans les familles recomposées où l'amour réciproque ne va pas de soi.

Quand Yohan, trois ans, devient grand-frère, il se trouve confronté à une perte certaine. Il perd tout simplement cinquante pour cent de tout ce qu'il a pris l'habitude d'avoir pour lui tout seul. Il est alors difficile d’être soi-même en deuil au sein d'une famille qui exulte de joie par rapport au nouveau-né. Yohan a donc besoin que les adultes reconnaissent de temps à autre ses sentiments mitigés. Cela peut tout simplement se faire en le prenant sur les genoux et en lui disant : « C'est formidable de voir comment tu es gentil avec ta petite sœur, mais ça doit aussi être ennuyeux pour toi de voir qu'elle prend tout à coup autant de place. »

Avec une telle remarque, Yohan peut tranquillement gérer lui-même sa perte et ses sentiments mitigés ne se transformeront pas en agressivité envers sa petite sœur.
 
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Violence éducative et communication

 

Gifle ou fesser un enfant, c’est, d’une certaine manière, communiquer avec lui. Mais que communique-t-on à un enfant en le frappant? Les connaissances actuelles sur le développement du cerveau ne nous laissent plus de doute aujourd’hui : la violence éducative, si faible soit-elle, est destructrice. Les institutions internationales ont compris que sa réduction serait un facteur de paix. Reste à en convaincre l’opinion publique et les Etats.

Cet article d'Olivier Maurel a déjà paru dans le magazine Bio Contact.

 

L’enfant se forme par la communication

Même né à terme, le nouveau-né humain est prématuré, c’est-à-dire longtemps incapable de survivre sans assistance. Son corps sait que, pour survivre, il doit obtenir les soins, la bienveillance, la protection des adultes.
Dès sa naissance, loin d’être passif, il participe activement, de multiples façons, à la création de liens avec ses parents. Téter, comportement de survie, est aussi un moyen d’établir un lien très fort avec sa mère. Ses pleurs sont des appels. Sa capacité à distinguer de son environnement la forme des visages, et notamment celui de sa mère, lui permet d’attirer du regard ceux qui l’entourent et donc d’accentuer l’intérêt qu’on lui porte.
C’est au cours de cette communication intense et vitale avec son entourage que son cerveau se forme. Ses neurones, déjà en place à la naissance, développent leurs axones, ces filaments qui les relient, et leurs milliards de connexions provoquent l’accroissement du volume de son cerveau qui passe du quart de son poids définitif à la naissance, à 50% à six mois et 95% à dix ans.

 

La communication “sculpte” le cerveau

 

La neurobiologie nous apprend que la communication interne entre les neurones dépend en partie des formes de communication que l’enfant établit avec ceux qui l’entourent. Le cerveau de l’enfant est “sculpté” par les expériences auxquelles il est confronté. "Tout
le développement de l’être humain, dit le neurobiologiste américain Bessel van der Kolk, spécialiste du stress post traumatique, c’est le développement des lobes frontaux. En tant que parents, nous sommes les médiateurs du développement du lobe frontal de nos enfants.
Lorsque nous lisons des histoires à nos enfants, lorsque nous les serrons dans nos bras, lorsque nous jouons avec eux, nous assurons le bon développement du lobe frontal. Si un enfant est toujours effrayé, terrifié, s’il n’est pas câliné, s’il est abandonné, négligé, ses
lobes frontaux ne se développent pas correctement et ils ne parviendront pas à assumer leur fonction qui est d’inhiber le système limbique. Dans ce cas, le lobe frontal n’est pas assez développé pour aider la personne à être en contact avec le présent. Elle sera incapable d’enregistrer des informations nouvelles et d’apprendre par expérience1 ".

 

Mais il en faut peu pour perturber le développement du cerveau

 

Des lésions infimes suffisent pour perturber le développement du cerveau d’un enfant.
Le neurobiologiste Antonio Damasio, par exemple, écrit qu’“un dysfonctionnement du système cérébral (...) peut être dû à un défaut de fonctionnement microscopique des circuits neuraux”. “Même des perturbations mineures des systèmes neuraux spécifiques suscitent une modification majeure des phénomènes mentaux.” 2
Joseph Le Doux, autre neurobiologiste réputé, écrit de son côté : “Quelques connexions supplémentaires d’un côté, un petit peu plus ou moins de neurotransmetteurs de l’autre, et les animaux commencent à se comporter différemment.3 ” Et les centres du cerveau
des émotions et de la mémoire émotionnelle, qui sont essentiels pour le comportement relationnel, sont particulièrement vulnérables.
Van der Kolk, déjà cité, a déclaré récemment au Nouvel Observateur4 : « On se méprend beaucoup sur la notion de traumatisme, qu'on assimile à tort à un évènement horrifique et exceptionnel. (...) Il y a aussi la foule des malheurs ordinaines inhérents à la condition humaine. S'ils ont été vécus dans un sentiment d'impuissance et de désespoir, ils peuvent eux aussi laisser une cicatrice douloureuse longtemps après les faits. Tous
ceux qui ont eu des parents violents, vécu une relation pénible, la mort d'un ami ou même un accident le savent bien. Ils ne présenteront pas forcément tous les symptômes de l'Etat de Stress PostTraumatique” mais “nos recherches nous montrent qu'à un degré moindre de très nombreuses personnes portent la trace du trauma dans leur corps ».


 

Quand l’enfant est agressé par sa base de sécurité

 

Aucun comportement inné de l’enfant ne le prépare à être agressé par sa mère ou son père qui sont sa base de sécurité. Un enfant agressé par une tierce personne peut crier pour appeler sa mère; s’il est assez grand, il peut courir se jeter dans ses bras. Mais un
enfant agressé par sa mère ou son père, même si cette agression se limite à une tape, une gifle ou une fessée, ressent cette situation d’isolement comme une situation de danger. Tout son corps sait qu’il ne peut pas survivre seul. Et la relation de confiance établie avec ses parents est pour lui vitale. Attaqué par ceux qui assurent sa survie, ce que son corps éprouve, c’est angoisse et stress.
Or, le stress est une réaction normale et bénéfique quand elle peut aboutir au comportement auquel elle prépare tout l’organisme : la fuite ou la défense. Dans ce cas, les hormones diffusées dans l’organisme d’un animal ou d’un homme sur l’ordre de son cerveau, mettent son corps en état d’alerte. Puis, lorsque l’organisme en danger (animal ou humain) a pu fuir ou se défendre, il retourne progressivement à son état normal sans dommages pour son équilibre interne.
Mais les expériences de Henri Laborit, présentées dans le film d’Alain Resnais Mon Oncle d’Amérique, ont montré que lorsqu’un animal en situation de stress ne peut ni fuir ni se défendre, les hormones du stress deviennent toxiques, attaquent le système digestif et les
neurones. De plus, le système immunitaire, désactivé par le cerveau en cas de stress, par “économie d’énergie”, perd de son efficacité s’il l’est trop souvent.
Or, l’enfant frappé par ses parents ne peut précisément ni fuir, parce qu’il est physiquement retenu et entièrement dépendant de ses parents, ni se défendre parce qu’il est trop faible ou qu’il est impensable de leur rendre les coups. Et quand les parents ont pris l’habitude de donner des gifles et des fessées, l’enfant peut en recevoir souvent, précisément pendant toute la période où son cerveau se forme.
Il n’est donc pas étonnant que les enfants frappés dans leurs premières années soient plus souvent malades, et ont une propension à subir des accidents plus graves et plus fréquents que les enfants qui ont été respectés5 .
Il faut avoir présente à l’esprit cette vulnérabilité du cerveau des enfants quand on aborde la question de la violence éducative ordinaire, c’est-à-dire de toutes les formes de violence physique, même légères, qu’on trouve normal d’utiliser pour leur éducation. En
réalité, ces violences s’insèrent dans le réseau de communications qui contribue à la formation de l’enfant, mais de façon destructrice, et elles y ont bien d’autres effets que ceux que nous imaginons.


 

Les messages destructeurs de la violence éducative

 

Nous croyons en général qu’une gifle ou une fessée dissuade simplement l’enfant de reproduire un comportement répréhensible.
Mais le message idéologique qu’une gifle ou une fessée envoie à un enfant est bien plus complexe et plus destructeur. Parce que nous sommes les modèles de nos enfants, une gifle ou une fessée inculque en un seul geste et d’un seul coup (c’est le cas de le dire!) une
formidable leçon d’immoralité et d’antidémocratie. Elle leur apprend en effet que :
- Quand on n’est pas d’accord avec quelqu’un, on a le droit de le frapper, même si on l’aime.
- Quand on est grand et fort, on a le droit de frapper les êtres petits et faibles.
- Quand quelqu’un vous frappe ou vous menace, il faut se soumettre à lui.
- La violence est un mal mais c’est aussi un bien, puisque c’est “pour son bien” qu’on frappe l’enfant.
De telles maximes ne peuvent que dérégler la boussole intérieure d’un enfant et lui rendre difficile la distinction du vrai et du faux, du bien et du mal. Elles le rendent vulnérable à toutes les propagandes, ou au prestige des gourous, des caïds de quartier ou des prédicateurs de terrorisme. Faire violence aux autres “pour le bien” d’un parti, d’une religion, d’une nation ou pour son propre bien lui paraîtra normal : c’est ce que ses modèles lui ont appris pendant les années où son cerveau se formait.
Et il pourra aller très loin dans la violence, parce qu’un autre effet de la violence éducative est de détériorer le sens de l’empathie.

 

L’empathie, base innée de l’altruisme

 

Il existe chez les animaux et donc chez nous, une capacité d’empathie qui nous permet d’identifier et de comprendre les émotions des autres et donc de considérer autrui comme un semblable. C’est la base émotionnelle de l’altruisme.
Des singes, l’expérience en a été faite, sont capables de se priver de nourriture s’ils doivent, pour se la procurer, faire souffrir un de leurs congénères. Cette forme instinctive de la règle d’or de la morale : Ne fais pas aux autres ce que tu ne veux pas qu’on te fasse, est présente aussi en nous, si du moins l’éducation ne la détruit pas par des messages et des exemples qui la contredisent. Or, l’enfant qui subit de ses parents des punitions
douloureuses, doit se blinder pour survivre et se ferme à ses propres émotions. C’est ainsi qu’est mise hors circuit la capacité d’empathie. Quand cette capacité naturelle est désactivée, toutes les morales et toutes les religions du monde ne sont plus que des
prothèses, incapables d’inspirer un comportement altruiste dans les situations de crise. Pires, elles peuvent devenir des idéologies auxquelles il semble normal de sacrifier hommes, femmes et enfants que l’on ne ressent plus, émotionnellement, comme des semblables.
On a vu ainsi un des peuples les plus cultivés et christianisés d’Europe, mais massivement élevé de façon autoritaire et violente, commettre ou laisser commettre le pire des génocides sous les ordres d’un homme, Hitler, dont l’enfance avait été elle-même ravagée par la violence et les humiliations de son père. C’est ce qu’a montré Alice Miller dans son livre C’est pour ton bien6 . Et ses recherches sur l’enfance des dictateurs du XXe siècle ont révélé qu’ils ont tous été victimes de violence éducative, qu’il s’agisse de Staline, de Mao, de Ceausescu, d’Amin Dada ou de Saddam Hussein.

 

Un résultat minimum garanti de la violence éducative

 

Mais, pensera-t-on peut-être : “J’ai été frappé et je n’en suis pas devenu criminel pour autant!”
Heureusement, les effets destructeurs de la violence éducative sur le cerveau et le psychisme sont souvent compensés par la rencontre de personnes qui, par leur affection et leur respect, permettent aux enfants de retrouver une part de leur respect d’eux-mêmes et d’avoir un comportement conforme à la morale admise dans leurs relations avec les adultes.
Mais le résultat minimum presque garanti de la violence éducative, si nous ne l’avons pas identifiée comme un mal, c’est de nous rendre aveugles à nos propres contradictions parce que cette violence a perturbé notre sens moral et notre sens de la logique.
Ainsi, nous serions outrés si un policier nous giflait pour une infraction au code de la route. Pourtant, nous giflons les enfants pour des actes bien moins graves que nos infractions. De même, nous serions outrés si, dans une maison de retraite, nous voyions un
membre du personnel gifler une pensionnaire qui, en raison de son âge et de la détérioration de son cerveau, refuse de manger ou de se laver. Pourtant, les comportements de nos enfants sont aussi dus à leur âge et à l’immaturité de leur cerveau.
Et il n’est pas nécessaire d’être gravement maltraité pour tomber dans cette contradiction. L’enfant victime de banales gifles et fessées dès son plus jeune âge ne voit plus ensuite ce qu’il y a d’anormal à frapper les enfants car sa tolérance à l’égard de la
violence s’est accrue.

 

Une possibilité de réduire la violence?

 

 

Prendre conscience de cette contradiction et des dégâts causés par la violence éducative peut agir sur l’avenir du monde. Depuis des millénaires, les hommes ont été soumis, au moment où leur cerveau se formait, à des violences dont la forme la plus courante était la
bastonnade. Le neurobiologiste, Antonio Damasio, déjà cité dans cet article, m’a personnellement confirmé que nos violences, très supérieures à celles dont les animaux sont capables sur leur propre espèce, peuvent avoir leur source dans ces traitements infligés aux enfants.
Interdire toute forme de violence éducative et aider les parents à adopter des méthodes d’éducation sans violence est donc probablement la plus sûre façon de réduire la violence humaine.
L’UNICEF, l’Organisation Mondiale de la Santé, le Comité des droits de l’enfant de l’ONU, le Conseil de l’Europe s’unissent actuellement pour obtenir cette interdiction dans tous les pays.
Malheureusement, la France est très en retard dans ce domaine et elle a même été absente de la conférence qui a réuni sur ce thème plus de 40 pays d’Europe et d’Asie centrale en juillet dernier, en Slovénie.

 

Que pouvez-vous faire?

 

- Vous informer en lisant la brochure de l’association Ni claques ni fessées (3 villa Quincy 92170 Vanves; tél : 01 46 38 21 22) ou mon livre La Fessée, Questions sur la violence éducative (12€).
- Si vous avez de jeunes enfants, lire le livre de Thomas Gordon : Parents efficaces (Marabout) ou celui de Catherine Dumonteil Kremer : Poser des limites à son enfant (Jouvence).
- Signer la pétition pour l’interdiction de la violence éducative en France adressée au premier Ministre (La demander à O. Maurel 1013C Chemin de la Cibonne 83220 Le Pradet; ou par e-mail à omaurel@wanadoo.fr).
- Participer à la recherche sur la violence éducative en m’envoyant, même sous anonymat, votre témoignage sur la façon dont vous avez été élevé.
- Participer aux activités de l’Observatoire de la violence éducative (https://www.observatoire-international-de-la-violence-educative.org).

Olivier Maurel


Professeur retraité.
Président de l’Observatoire de la violence éducative ordinaire (OVEO)

Bibliographie :
- Allemagne 1631 : un confesseur de sorcières parle (L’Harmattan, 2000)
- La Fessée, Questions sur la violence éducative (La Plage, 2001;
réédition augmentée, 2004).
- La Non-Violence active, Cent questions-réponses pour résister et
agir (La Plage, 2001).
- Essais sur le mimétisme (L’Harmattan, 2002).
- Oedipe et Laïos, Dialogue sur l’origine de la violence
(L’Harmattan, 2003).

 
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